JEAN-SIMEON CHARDIN  1699 - 1779

La raie

Chardin a placé sur la droite de sa composition des objets du quotidien, écumoire, cruche, poêlon, couteau. Le monde inanimé

Sur la gauche le monde animal : les huîtres, la carpe, un jeune chat, un des rares animaux vivants que l'artiste ait osé peintre

La raie éventrée domine la composition, une raie hideuse sanguinolente à face humaine

Chardin ne cache pas sa dette envers les maîtres flamands mais veut prouver qu'il ne leur est plus soumis

Composition surchargée et quelque peu confuse

 

 

Panier de raisins blancs et noirs avec un gobelet d’agent

La muraille de brique qui clôt la composition est celle de La Raie

La poire, les prunes et même le large panier d’osier rempli de fruits paraissent en équilibre incertain

L’ensemble de la composition manque de stabilité

Présence de l’imposant gobelet d’argent qui ne quittera pas Chardin car il le représentera à de nombreuses reprises

Chardin observe avec attention le jeu des reflets sur l’argent et sur le verre de la bouteille

Il veut rendre le poids, la consistance et le volume de chaque fruit

Mais il recherche avant tout l’harmonie des couleurs

 

 

Le gobelet d’argent

Fiché dans une miche de pain un couteau se détache devant une niche de pierre

Une bouteille à demi pleine de vin rouge, placée derrière un plat d’étain, occupe le centre de la composition

Sur la droite la timbale d’argent

La lumière qui vient de la gauche nuance les bruns chauds de la niche incurvée

Le double entablement de la pierre donne sa profondeur à la composition

Chardin s’intéresse surtout à l’effet d’ensemble et à l’équilibre, des masses, des couleurs, des ombres et des lumières

 

 

 

 

Gobelet d’argent, pêche, raisin blanc et noir

Chardin dispose avec attention les fruits et le gobelet d’argent sur un double entablement de pierre

Le gobelet et les fruits sont éclairés par la gauche.

La lumière frappe les grains de raisin, la pomme et la pêche dont le reflet distordu se détache sur le gobelet

L’étagement des fruits donne à la composition sa profondeur

Chardin écarte tout élément anecdotique et renonce à la minutie du rendu, au trompe-l’œil, au décoratif et à l’ornement

 

 

 

Carafe à demi pleine de vin, gobelet d’argent

Un gobelet d’argent et quelques fruits autour

Le brillant du gobelet n’est fait que par quelques touches de blanc égratignées de pâte sèche

Le rouge dans les ombres est le reflet des cerises contre le gobelet

Un rappel de toutes les couleurs ambiantes glissant sur le métal poli du gobelet

 

 

Panier de prunes, bouteille à demi pleine

La lumière vient de la gauche

Contrastes harmonieux entre les bleus veloutés des prunes et les jaunes des deux gros concombres

Entre la bouteille anthracite et le verre d’eau transparent à demi plein

Jeu savant des reflets

Opposition des chauds et des froids

 

 

Chat avec tranche de saumon, deux maquereaux, mortier et pilon

Chardin introduit dans sa composition un animal vivant

Un chat à la queue redressée pose sa patte sur une tranche de saumon

Tranche de saumon d’un beau rouge corail

Deux maquereaux sont accrochés au mur

Un couvert de poterie d’un vert profond

Un mortier avec son pilon

 

 

 

Pot d’étain avec plateau de pêches

Chardin a peint devant le motif son pichet d’étain ainsi que les fruits volumineux savamment disposés sur un large entablement de pierre

Il les a peints vus par en-dessous afin d’accentuer leur monumentalité, de les magnifier

Pot d’étain et plateau d’osier de détachent devant un fond peint en frottis

Une lumière quelque peu irréelle vient de la gauche et éclaire les fruits dont les reflets se renvoient multipliant les chatoiements des couleurs

Chardin dispose ses fruits et joue des contrastes entre les roses tendres des pêches et les bleus veloutés des prunes

Il fuit les droites et recherche la variété des courbes

 

 

 

Deux lapins morts avec gibecière

L’œil est immanquablement attiré par l’orange, en fait une bigarade, sorte d’orange amère dont l’écorce était  utilisée en pâtisserie

Puis le regard se porte vers le deux lapins de garenne, la poire à poudre, la gibecière peints dans une harmonie de blancs sales, de gris,  de crèmes et de beiges

Quelques brins de paille sont posés sur l’entablement de pierre

 

 

 

La perdrix grise est attachée par un fil à un gros clou fixé au mur devant une niche de pierre

Un grand panier de poires, une jatte de prunes, deux pêches dont l’une est ouverte, deux figues, du céleri complètent une composition étagée sur deux plans

Chardin dispose savamment de l’espace

La lumière qui vient de gauche crée l’harmonie de la composition

 

 

Lapin mort avec perdrix rouge

Sur un entablement de pierre gisent une perdrix rouge et un lapin de garenne

La bigarade ornée de trois feuilles vertes fait conte point à la perdrix aux pattes et aux ailes écartées

Son bec se détache devant le pelage gris-blanc sale du ventre du lapin

La longue oreille et la tête du lapin débordent, selon une pratique chère à Chardin de l’entablement

L’artiste veut donner de la stabilité à sa toile grâce à l’oblique formée par le lapin qui barre la composition de gauche à droite

 

 

 

 

Jatte de prunes avec pêches

Le pot à eau avec son décor de papillons est unique dans l’œuvre de Chardin

Chardin ne peint pas d’imagination, il a besoin d’avoir en permanence sous les yeux ce qu’il copie

 

 

Un chat guettant une perdrix

Couchés sur un large entablement de pierre, une perdrix grise aux ailes ouvertes et un grand lièvre roux à l’œil vitreux, aux pattes déjà raides, occupent le centre de la composition

Un chat les guette et s’apprête à bondir

Au premier plan une pomme d’un beau rouge, des châtaignes, deux grosses poires

Derrière le lièvre une soupière sur laquelle l’artiste a bizarrement posé une bigarade, sorte d’orange

L’œil va du chat à la bigarade de taille disproportionnée, fait halte sur les fruits et surtout sur le lièvre

Inhabituelle réunion sur la même toile de la chasse et de la cuisine

 

 

 

 

Lapin de garenne mort

Le poil du lapin de garenne est rendu par de multiples coups de pinceau, répétés, bien visibles

Touche rugueuse

Au-delà de la respiration de la composition et de la vibration de la lumière il y a ce sérieux devant la mort qui distingue Chardin parmi tous les peintres animaliers

 

 

Lièvre mort avec gibecière et poire à poudre

Si la disposition de l’animal et l’ombre portée de ses pattes font supposer un mur, la limite des deux plans géométriques n’est pas marquée dans la toile, le fond restant vierge de toute information

Cette toile est une des plus accomplies et des plus dépouillées de Chardin par l’audace de la mise en page, l’élimination de tout détail, une composition réduite au lièvre qui repose sur la gibecière à la poire à poudre, à la variété et à la multiplicité des bruns

Soin apporté à l’observation de la lumière

 

 

 

 

Instruments de musique et perroquet

Sont posés sur une table de pierre un violon d’une belle couleur brune accompagné de son archet, une musette rouge cerise aux tuyaux d’ivoire et d’ébène et deux partitions

Le perroquet bleu et vert est un des rares oiseaux vivants peints par Chardin

A gauche une aiguière de bronze richement ciselée

Le peintre multiplie les plans et fait alterner les zones d’ombre et de lumière

 

 

 

 

Instruments de musique et corbeille de fruits

Composition champêtre avec son panier d’osier rempli de fruits et ses branches de fleurs de chèvrefeuille

Sur la table de pierre une guitare avec sa bretelle bleu ciel, un cahier de musique, une flûte traversière, une vielle à roue et un tambour orné de nœuds roses

Composition mouvementée, plus libre, quelque peu instable

 

 

 

Un canard col vert attaché à la muraille

Chardin a peint le canard d’après nature, sur le motif

Il l’a accroché par la patte droite à la muraille, à l’aide d’un nœud coulant, et a placé à droite une bigarade qui a gardé sa tige et ses feuilles

Variété du gris du ventre et des ailes

Chardin a reproduit son plumage avec subtilité

Les quatre taches rouges des pattes du canard, de son bec et du fruit ponctuent la composition

Equilibre impeccable

 

 

 

Retenu à la muraille par un gros clou, les pattes largement écartées, il barre en oblique la toile de la droite vers la gauche

Une gibecière et une poire à poudre , dont la courroie bleue se détache sur le ventre blanc du lièvre taché de sang, sont posés sur un large entablement de pierre

En dépassent une patte, la tête et les longues oreilles du lièvre

Il semble glisser de la table mais la lumière qui vient de la gauche rétablit l’équilibre d’une composition volontairement mouvante

Le lièvre est à peine raidi dans le mol abandon de la mort

 

 

 

Le chien barbet

Chardin place sa composition dans un paysage de convention, plein air, qui lui est inhabituel et auquel il renoncera bientôt

Il fut demandé à Chardin de peindre le fusil avec exactitude

Chardin était persuadé que le peintre devait tout tirer de sa tête et qu’on avait besoin de la nature que lorsqu’on manquait de génie

Il s’attacha à l’exécution de cet objet et le rendit bien mais non pas aussi facilement qu’il l’avait imaginé

Il s’aperçut que la vérité de la couleur  et des effets de la lumière que la nature présente sont difficiles à atteindre

 

 

 

 

Nature morte au gigot

A partir de 1730 Chardin représente des intérieurs de cuisine

Il joue avec un nombre limité « d’ustensiles et objets de ménage » qu’il dispose à sa guise sur une table de pierre, à une certaine distance de son chevalet

Un gigot pendu à un croc domine la composition, vivement éclairée par la gauche

Exécution par petites touches rapides qui multiplient les éclats de lumière

Alors que Chardin avait peint certains fruits plus grands que nature, ici il réduit et miniaturise les récipients et les objets qu’il représente pour la rigueur de leurs formes

 

 

 

Nature morte au carré de mouton

Nombreux éclats lumineux disposés avec intelligence

Exécution par petites touches précises et bien visibles

Le nombre des objets représentés ne facilite pas la lecture de l’œuvre

Composition parfaitement équilibrée selon un jeu savant de droites et d’obliques, de saillies et de creux, de clairs et de sombres

 

 

 

Nature morte à la raie et au panier d’oignons

Aux habituels ustensiles de cuisine le peintre ajoute un poulet, à demi plumé, le ventre en l’air, un fromage entamé, trois œufs, un panier d’oignons et une raie pendue à la muraille par un croc

Chardin dispose avec attention ces objets choisis pour leurs formes et leurs couleurs, leur matière, leur consistance, leur éclat ou leurs ombres

Ce n’est que lorsque cette mise en scène est achevée qu’il prend ses pinceaux et se met à l’œuvre

 

 

Menu de gras

Ses cuivres comptèrent pour beaucoup dans la renommée de Chardin au 19ème siècle

Chardin dispose attentivement la nourriture des jours de gras (pièce de bœuf, rognons crus, carafe de vin) d’une couleur chaude

Des bruns, des marrons, des rouges

Chardin miniaturise la taille des objets choisis pour la rigueur de leurs formes

 

 

 

 

Menu de maigre

Chardin dispose avec attention la nourriture des jours de maigre (maquereaux, œufs, poireaux) d’une couleur chaude

Des gris

Chardin multiplie les objets ce qui rend plus délicate leur disposition dans l’espace

 

 

Deux lapins, une perdrix grise

A partir de 1731 Chardin ne peindra plus guère de natures mortes de gibier

Il réalise de grandes décorations, s’intéresse au trompe-l’œil, se consacre à la représentation des ustensiles et objets de ménage mais surtout se tourne vers la scène de genre

1731 est aussi l’année de son mariage avec Marguerite Saintard et de la naissance de son fils

C’est aussi une année de difficultés financières qui l’obligent à collaborer (avec Van Loo) à la restauration de la galerie François 1er à Fontainebleau

Deux lapins, une perdrix grise aux ailes largement ouvertes et une gibecière se détachent devant une muraille peinte en frottis ornée de chèvrefeuille

Les pattes des trois animaux morts sont liées par un ruban bleu roi

La tête d’un lapin pend sur le devant du banc de pierre

Pyramide parfaite et harmonieuse disposée avec simplicité et naturel

La composition d’un grand raffinement chromatique, allie rigueur et sobriété, tendresse, pudeur et émotion

 

 

 

 

Femme cachetant une lettre

On peut penser que les natures mortes, qu’elles soient d’animaux, de fruits ou d’ustensiles de cuisine ne suffisaient plus à satisfaire la clientèle de Chardin

La Femme occupée surprend par son format (146*147) et son sujet

Une jeune personne attend avec impatience qu’on lui donne de la lumière pour cacheter une lettre

Dès cette première tentative Chardin dans l’observation des gestes, la manière dont il sait guider notre regard sur les taches blanches et rouges de la lettre et du bâton de cire crée ce climat de chaude intimité et de recueillement qui le distingue

L’artiste renoncera bientôt aux scènes de genre « luxueuses » (ici lévrier, tapis, flambeau d’argent, robe du modèle) au profit de sujets domestiques plus familiers et plus directs

La jeune personne est impatiente de cacheter un billet que l’on devine amoureux

Elle regarde la chandelle sur laquelle se penche un serviteur à collet de fourrure

Ils sont chacun absorbés dans leurs pensées, proches et cependant fort éloignés

 

 

 

 

La blanchisseuse

Chardin a réalisé avec ce tableau son premier chef d’œuvre intimiste

Une femme lessive entourée des objets les plus communs

Un garçonnet fait des bulles de savon

Par une porte entrebâillée et largement éclairée on aperçoit une femme vue de dos qui pend son linge

Un chat rêve

Les personnages loin et proches les uns des autres, chacun dans leur monde, prennent part à cette intimité discrète

Les gestes sont comme figés, les visages sans grande expression

Chardin porte tout son intérêt à la construction de l’espace et veut nous rendre attentifs à la paix et au silence de cette scène familière

 

 

 

Table de pierre avec un pichet, une tranche de saumon posée sur un couvercle

Sur une table de pierre incurvée et devant  un mur également cour Chardin dispose un pichet, un poêlon, un chaudron de cuivre, une cruche ainsi que deux œufs, une tranche de saumon et trois harengs

Il choisit ces objets pour leur forme, leur consistance, leur matière, leurs couleurs et les reflets que provoque la lumière qui vient de la gauche

Il alterne les zones d’ombre et de lumière, les chauds et les froids

 

 

 

 

L’ouvrière en tapisserie

Une jeune femme choisit dans un panier à ouvrages une pelote de laine bleue

Elle porte un large tablier et un bonnet, blancs l’un et l’autre

Petite composition lumineuse et d’une grande richesse chromatique

L’ouvrière nous entraîne dans sa rêverie

Un mélange de lassitude et d’indolence se lit sur le visage de l’Ouvrière

 

 

 

 

Un jeune écolier qui dessine

Assis par terre, coiffé d’un tricorne, un jeune dessinateur vu de dos appuyé sur son portefeuille recopie à la sanguine une académie masculine épinglée au mur, elle aussi à la sanguine

Le manteau est déchiré à l’épaule laissant voir une tache rouge de l’habit

Sur le sol le couteau qui sert à tailler le crayon

A droite un châssis et une toile vierge

Chardin recopiait dans l’atelier de Cazes (1676-1754) les académies de son maître

« Nous avons eu longtemps le dos courbé sur le portefeuille

On nous a tenu cinq à six ans devant le modèle »

« Il faut apprendre l’œil à regarder la nature »

La concentration, le soin, l’attention du Jeune écolier sont si sensibles que Chardin n’éprouve pas le besoin de nous montrer son visage

 

 

 

 

Egrugeoir avec son pilon, chaudron de cuivre

Le chaudron est couché de biais et laisse voir son intérieur cuivré

Les objets font allusion à la cuisine : égrugeoir, (petit moulin en bois servant à réduire le sel ou tout autre aliment en poudre), oignons, bol et couteau

Pate lumineuse, tonalité chaude

Saurions-nous admirer ces ustensiles de cuisine si courants sans les tableaux de Chardin ?

 

 

 

 

La fontaine de cuivre

La fontaine de cuivre et son ombre se détachent devant un magnifique mur gris

Elle est entourée d’une cassotte à queue, d’un seau d’eau, d’une cruche de terre vernissée et des son couvercle posé sur le sol

C’est la fontaine de la demeure des Chardin

L’air circule entre les objets disposés dans l’espace

La lumière est comme abstraite

Refus du pittoresque, du détail superflu

 

 

 

 

s bulles de savon

Chardin a une prédilection pour la représentation d’adolescents absorbés dans une activité ludique

Ce thème est populaire en Hollande au 17ème siècle et en France au 18ème

 

 

 

 

Le souffleur

Le souffleur est celui qui par la chimie cherche la pierre philosophale

On distingue à l’arrière-plan les accessoires du laboratoire

Chardin a peint l’image d’un philosophe absorbé dans sa méditation, qui ne se contente point de lire, qui médite et approfondit

Chardin est un virtuose du silence. Il nous le rend présent, il lui donne un poids tactile, par la qualité de la lumière et de la texture

 

 

 

 

Le jeune homme au violon

Le jeune homme se tourne vers nous et nous regarde, ce qui est exceptionnel chez Chardin

L’artiste a recherché la ressemblance mais il a voulu faire élégant en nous présentant un jeune homme souriant et sérieux chez qui se devine l’amour de la musique

C’est le portrait de Charles-Théodose Godefroy, nommé capitoul de Toulouse en 1750, future seigneur de Villetaneuse

Il était passionné de musique et compositeur amateur

 

 

 

 

Une dame qui prend du thé

Certaines maladresses dans la perspective : la chaise, la table placée de biais, le bec de la théière

Harmonie des couleurs, gris vert de la robe au liséré rouge, rouge vif du vernis de la table, divers bleus du châle à pois et du bonnet

Chardin s’est attaché à décrire avec pudeur et discrétion l’expression vague et rêveuse de sa femme absorbée dans la contemplation de la vapeur qui s’échappe de la tasse à thé

 

 

 

Le château de cartes

Le fils de M. Le Noir s’amusant à faire un château de cartes

Chardin dispose avec un grand soin son modèle et les objets qui l’entourent

Beau tricorne noir et belle table

Chardin peint son modèle immobile et silencieux, replié sur lui-même, souriant, absent et absorbé

Il pose un regard tendre sur son modèle

 

« Aimable Enfant que le plaisir décide,

Nous badinons de vos frêles travaux :

Mais entre nous, quel est le plus solide

De nos projets ou bien de vos châteaux »

 

 

 

 

Pipes et vase à boire

Une tabagie de bois de palissandre fermant à clé et main d’acier doublée en dedans de satin bleu

Nous ne savons pas si Chardin était fumeur

Cette tabagie est due à quelque tablier ami de Chardin père qui était lui-même fabricant de billards

Minuscule note rouge de la pipe incandescente au fourneau noirci dont s’échappent quelques volutes de fumée

Roses passées du pot de porcelaine de couleur et de son couvercle

Harmonie des bleus et des blancs poreux

Parfaite diagonale du tuyau de la pipe

Longues ombres qui s’étalent sur la pierre

Agencement subtil des horizontales et des verticales

 

 

 

La fillette au volant

Une toute jeune fillette au regard fixe et au nez retroussé, à l’allure de poupée, s’apprête à se servir de sa raquette et de son volant orné de plumes multicolores

Son bonnet à fleurs cache ses cheveux poudrés

A son cou un ruban de soie blanche, à l’oreille une bouche d’or

Un large ruban bleu retient ses ciseaux et la pelote d’épingles

Il se détache du tablier à plastron d’un magnifique blanc laiteux

Œuvre attendrissante dans sa simplicité, désarmante dans sa pureté

Rarement fillette n’a été décrite avec autant de délicatesse et de pudeur, de tendresse et de sympathie, mais aussi de compréhension et de simplicité

 

 

 

L’enfant au toton

Auguste-Gabriel Godefroy (1728-1813), future contrôleur général de la marine n’a pas encore dix ans

Il contemple avec un sourire amusé un toton (une variété de toupie)

Il a abandonné la plume d’oie et le rouleau de papier ainsi que ses livres

Rigueur dans la construction de l’espace

Sur la gauche le plateau de la table et le tiroir entrouvert, l’encrier, la tache blanche du toton, seul élément mobile de l’œuvre

Sur la droite le garçonnet, élégamment coiffé, soigneusement vêtu à la française avec ses manches à larges revers

Expression calme et réfléchie de l’enfant, silencieux, abstrait et oublieux du monde qui l’entoure

L’artiste porte sur son modèle un regard attendri et compréhensif

 

 

 

Le jeune dessinateur

Visage d’adolescent doux et serein, concentré et rêveur

Equilibre de la composition

Harmonie des couleurs, des blancs laiteux, la tache noire du tricorne, les bleus du mobilier et de la feuille de papier, le ruban rouge du carton

L’expression de douce satisfaction et de réserve inquiète du jeune dessinateur qui contemple son dessin tout en taillant son porte-craie donne à la scène un sentiment de quiétude heureuse

 

 

 

 

La récureuse - Le garçon cabaretier

La récureuse et le garçon cabaretier se répondent

La cuve sur laquelle le garçon appuie son broc est proche de la barrique que l’écureuse utilise pour nettoyer sa poêle

La clé qui pend à la taille du cabaretier renvoie à la médaille attachée au ruban bleu suspendu au cou de l’écureuse

Le broc à la bassine de cuivre

La bouteille et son entonnoir au poêlon de terre vernissé

Les deux visages sont inexpressifs, comme absents

Chardin insiste sur la monumentalité des deux modèles, vus de profil et en pied

Rien d’anecdotique, rien de pittoresque

Leurs gestes répétés jour après jour ont quelque chose d’intemporel

Chardin donne le sentiment d’une durée indéfinie, nous montrant les personnages à la fois engagés dans une action et détachés d’elle

 

 

 

La pourvoyeuse

Ce tableau connut un grand succès

Blancs laiteux de la jupe de la femme

Les bleus passés de son tablier

La croûte dorée, farineuse des pains

Chardin nous montre la fontaine de cuivre à laquelle il a consacré une nature morte

Portes entrouvertes, plongeant les pièces dans l’ombre ou les inondant de lumière pour déboucher sur un jeune couple ou un minuscule coin de ciel bleu

 

 

 

La ratisseuse

Massive, légèrement voûtée, la Ratisseuse s’apprête à éplucher un navet

A ses pieds une citrouille, des concombres, une terrine dans laquelle baignent les navets nettoyés, un chaudron de cuivre et une casserole appuyée sur le billot taché de sang sur lequel est fiché un couperet

Chardin élimine tout détail anecdotique ou pittoresque

Perdue dans ses pensées la servante fixe le vide

 

 

 

 

La gouvernante

Le jeune écolier est grondé par sa gouvernante pour avoir sali son chapeau

Modération de la gouvernante dans les reproches qu’elle fait au jeune homme sur sa négligence

La honte et les remords du jeune homme sont exprimés avec naïveté

Attitude respectueuse et un peu humiliée de l’écolier

Sur un beau parquet d’assemblage à la française le garçonnet écoute sa gouvernante, ses livres d’écolier sous le bras

Un panier à ouvrages à ses pieds la gouvernante tient un tricorne qu’elle s’apprête à brosse

La raquette, le volant, les cartes évoquent les jeux de l’enfance

Chardin a toujours préféré représenter les femmes aux hommes, les adolescents aux adultes

Il exprime avec tendresse et pudeur la complicité entre l’enfant et sa maîtresse

 

 

 

 

La mère laborieuse

Une jeune mère, les ciseaux pendus à la taille, chaussée de mules roses et de bas bleus, examine en compagnie de sa fille une broderie

Devant elles un dévidoir avec son écheveau de laine, au pied duquel sont rangées les pelotes multicolores

Au premier plan à droite une bobine

Sur la gauche un coffre servant de pelote à aiguilles et un carlin ramassé sur lui-même

Derrière la mère et la fille un paravent qui retient le jour d’une porte entrebâillée

Une bourgeoise aisée montrant à sa fille la faute qu’elle a faite dans sa tapisserie

Proust « Il y a plaisir à voir une mère examiner la tapisserie de sa fille, les yeux pleins de passé de l’une qui sait, qui calcule et qui prévoit, les yeux ignorants de l’autre »

La mère selon le graveur Lépicié

 « Croyez-moi, fuyez la paresse

Et goutez cette vérité

Que le travail et la sagesse

Valent les biens et la beauté »

 

 

 

 

Le bénédicité

Au 19ème siècle ce tableau de Chardin devint le symbole d’une classe sociale vertueuse et laborieuse que l’on se plaisait à opposer à une

aristocratie débauchée et gaspilleuse

Les biographes de l’artiste au 18ème siècle insistent sur une pratique particulière pour l’époque « M. Chardin est obligé d’avoir continuellement sous les yeux le modèle qu’il se propose d’imiter, depuis la première ébauche jusqu’à ce qu’il ait donné les derniers coups de pinceaux »

Il ne faut pas voir dans ce tableau une profession de foi militante même si Chardin fut attiré par le renouveau janséniste du 18ème siècle

L’aînée prie tout en louchant sur son assiette alors que le garçonnet aux mains jointes observe sa mère

Chardin mêle profane et sacré et, grâce au triangle des regards nous fait assister à cette scène de tous les jours

 

 

 

 

La toilette du matin

Action d’une mère attentive qui attache une épingle à la coiffure de sa fille

La petite fille lance à la dérobée un regard dans le miroir pour satisfaire sa petite vanité et voir par elle-même si les soins de sa mère l’ont embellie

Les Goncourt « Le dimanche, tout le dimanche bourgeois tient dans cette toile »

Un missel et un manchon sont posés sur le tabouret recouvert d’un tissu rouge

Devant les deux femmes un miroir

Sur la droite une pendule

Ce sont surtout les étoffes et leur texture qui ont retenu l’attention de Chardin, comme les accords de couleurs, des bleus et des roses, des rouges et des bruns

A partir de 1740 dans ses scènes de genre l’artiste recule les personnages, diminue leur taille, fait mieux circuler l’air autour d’eux

 

 

 

Les amusements de la vie privée

Chardin eut une activité réduite de 1741 à 1746

Il tomba gravement malade en janvier 1742

Le 26 novembre 1744 il épousait en secondes noces Françoise-Marguerite Pouget, riche veuve de huit ans sa cadette

Leur fille mourut à l’âge de six mois le 23 avril 1746

L’artiste Chardin était lent, d’une extrême lenteur

« Je prends du temps parce que je me suis fait une habitude de ne quitter mes ouvrages que quand, à mes yeux, je n’y vois plus rien à désirer »

« Une sorte de langueur qui règne dans les yeux du modèle … on devine qu’elle lisait un roman et que les impressions qu’elle en a reçues le font rêver »

Le modèle est la nouvelle Madame Chardin

Chardin ne demandait pas de grosses sommes pour ses tableaux. Il tirait d’importants profits des gravures que l’on exécutait d’après ses compositions

Confortablement installée, ayant abandonné son rouet, la liseuse nous regarde et rêve

Large bergère rouge

Pot de porcelaine de Chine monté en argent

Chardin a voulu peindre cette paix qu’apporte la lecture et l’on comprend que les Goncourt aient émis le souhait que le tableau porte pour titre « Sérénité »

 

 

 

 

La garde attentive

Une garde-malade épluche un œuf

A terre une marmite dont dépasse le manche d’une louche

Sur une table à pieds tournés, à moitié couverte d’une nappe blanche, se voient un pain, un pot à eau en faïence, un couteau et dans une assiette un coquetier et son œuf

Une serviette est jetée sur l’avant-bras gauche de l’élégante servante

La garde-malade est vêtue d’une jupe rayée de vert clair, rose et blanc, d’un caraco blanc à fleurs roses et d’un tablier rose

La gamme des couleurs de Chardin est devenue plus délicate, plus raffinée, moins granuleuse

Ses compositions sont plus douces, plus intérieures, plus méditatives

 

 

 

 

Perdrix rouge morte

En 1748 Chardin revient à la nature morte qu’il paraissait avoir abandonné depuis plusieurs années

La perdrix rouge au plumage brun et blanc gît sur le côté

Derrière elle une grosse poire rouge se détache du mur

Le lacet et son nœud coulant qui a étranglé l’oiseau rompt l’horizontalité de la table de pierre

Exécution rapide et vigoureuse, à larges coups de pinceau

Composition plus ramassée, plus solide

L’œuvre s’impose par sa simplicité, sa dignité austère, mais aussi par sa tendresse envers l’oiseau mort

 

 

 

 

Bigarade, gobelet d’argent

L’année 1750 marque le retour de Chardin à la nature morte. Nous retrouvons bigarade, bouteilles, pommes et poire, gobelet d’argent

Il dispose toujours chaque objet en fonction de sa forme, de sa couleur, de sa consistance, des reflets qu’il provoque

La lumière froide venue de la gauche détaille les formes, éclaire les fruits, l’argent, le verre

 

 

 

 

La serinette

La Serinette est la première commande officielle reçue par Chardin onze ans après qu’il eut offert au rois sa Mère laborieuse

Charles-Antoine Coypel, premier peintre du roi, joua un rôle essentiel dans cette commande

Une jeune femme en bonnet et mantelet à capuchon, vêtue d’une robe brodée de fleurs, tourne la manivelle d’une boîte à musique, dite « serinette », sorte de petit orgue en usage pour apprendre à chanter aux serins

Devant elle un métier à broder auquel est suspendu un gros sac à ouvrage

Sur la gauche la cage de l’oiseau posée sur un guéridon

Le modèle, Madame Chardin, tourne la tête avec un sourire amusé vers son serin

 

 

 

 

Un lapin, deux grives mortes

Sur une table de pierre un lapin et deux grives

Thème traité vers 1730, il y a vingt ans

Un grand vide domine les animaux morts qui n’occupent qu’une partie de la toile

La gamme des couleurs est faite de tons sourds, d’une harmonie de gris et de bruns mis en valeur par le blanc du ventre du lapin et le rouge de quelques taches de sang

Exécution rapide et décidée par larges coups de pinceau ce qui étonne chez ce peintre lent

Chardin veut rendre le poids des oiseaux plutôt que leur poil ou leur plumage

Il les montre dans l’abandon de la mort

 

 

 

 

Bouquet d’œillets dans un vase de porcelaine

Coloris vigoureux, larges touches nettement posées et nullement fondues entre elles

Saisissant œillet rouge posé sur la tablette de pierre

Franchise de l’exécution, audace de la palette multicolore

On pense à Cézanne qui aime les mêmes bleus et la même simplification de la forme

Accord du blanc et du bleu

Lumière laiteuse

Malraux « Le rapport du bleu des fleurs avec le bleu du vase est épatant. Un autre aurait posé le vase sur du bleu, mais Chardin a mis du brun. Bleu et marron, les couleurs les plus difficiles pour un peintre, et voyez comme c’est réussi »

 

 

 

 

La table d’office

La Table d’office est un des premiers tableaux où Chardin se plaît à peindre des objets précieux, des mets rares

Première apparition de l’huilier avec son bouchon d’argent, du réchaud à esprit-de-vin et du pot à oille (pot au feu) avec son décor à fleurs polychromes

Chardin multiplie le nombre des objets qu’il représente, les miniaturise

Il charge sa mise en page

Il multiplie les taches de couleurs, les formes, ovales, cylindriques, coniques, les matières et les matériaux, métal, verre, porcelaine, pierre, bois, tissu

Mais cette somptuosité ne nuit en rien à l’équilibre de la composition, à sa perfection dans la disposition de chaque objet

 

 

 

 

Théière blanche avec raisin blanc et noir

Chardin simplifie sa composition, accorde une importance croissante à l’air, à l’ombre et à la lumière qui circule ente les objets et les fruits

Des fruits il s’attacha à rendre le velouté, la consistance, le poids

Il place sa théière, sa bouteille, le raisin et la pomme dans une pénombre quelque peu mystérieuse qui invite à la rêverie et favorise le calme

 

 

 

 

Panier de pêches, raisin blanc et noir, rafraîchissoir

Chardin a porté toute son attention sur la lumière qui vient de la gauche et modifie, nuance et varie la couleur du seau à oreille et des pêches

L’air impalpable qui enveloppe la composition lui donne son unité

« Les pêches et les raisins éveillent l’appétit et appellent la main »

 

 

 

 

Le bocal d’olives

Diderot « L’artiste a placé sur une table un vase de vieille porcelaine de la Chine, deux biscuits, un bocal rempli d’olives, une corbeille de fruits, deux verres à moitié pleins de vin, une bigarade avec un pâté

Pour regarder les tableaux des autres, il semble que j’ai besoin de me faire les yeux ; pour voir ceux de Chardin, je n’ai qu’à garder ceux que la nature m’a donnés et m’en bien servir

C’est que ce vase de porcelaine est de la porcelaine ; c’est que ces olives sont réellement séparées de l’œil par l’eau dans laquelle elles nagent ; c’est qu’il n’y a qu’à prendre ces biscuits et les manger, cette bigarade l’ouvrir et la presser, ce verre de vin et le boire, ces fruits et les peler, ce pâté et y mettre le couteau

O Chardin, c’est l’air et la lumière que tu prends à la pointe de ton pinceau et que tu attaches sur la toile

 

 

 

 

Le panier de fraises des bois

Rien de plus simple en apparence que cette pyramide de fraises des bois qu’accompagnent un verre à côtes plates, deux œillets, deux cerises et une pêche

Rien de plus audacieux que l’accord des rouges des fraises et de la blancheur des œillets, des verts de leurs tiges et de l’ocre du panier d’osier

 

 

 

 

Raisins et grenades

Ce que Chardin cherche avant tout, c’est à reproduire la texture de chaque objet, le velouté du raisin, à reproduire aussi les effets de la lumière directe ou réfléchie

Diderot « Vos compositions muettes parlent éloquemment à l’artiste ! Tout ce qu’elles lui disent sur l’imitation de la nature, la science de la couleur, et l’harmonie ! Comme l’air circule autour de ces objets »

 

 

 

 

Les Attributs des arts

Les Attributs font allusion aussi bien à la peinture qu’au dessin, à l’orfèvrerie comme à l’architecture, à la gravure, à la médaille (pinceaux et palette, équerre, masse de sculpteur)

La statuette au centre de la composition est la réduction de la figure centrale de la fontaine de la rue de Grenelle, une allégorie de la ville de Paris

En choisissant une œuvre contemporaine, Chardin tenait à préciser que la sculpture française moderne méritait la même admiration que l’antique

Aux yeux de Chardin Paris avait supplanté Rome

 

 

 

 

Les Attributs de la musique

Nous voyons sur la gauche un violon avec son archet à bouton d’ivoire, une musette de cour avec son sac de velours cerise brodé de fil d’or, ses deux chalumeaux, une flûte traversière, un cor, une trompette

La verticale blanche de la bougie est placée devant le pupitre à musique posé en biais

 

 

 

 

Les attributs des arts et les récompenses qui leur sont accordées

Catherine la grande, tsarine de Russie commanda ce tableau probablement sur les conseils de Diderot

Un plâtre du célèbre Mercure de Pigalle (1714-1785) occupe le centre de la composition

Le cordon noir avec la croix de l’ordre de Saint Michel sur la gauche fait également allusion à Pigalle qui fut le premier sculpteur français à être ainsi honoré

 

 

 

 

Le gobelet d’argent

Chardin donne une place essentielle à la pénombre

Au-delà de la ressemblance, il s’attache au rendu de la lumière et des ombres, des luisances et des reflets, de l’air impalpable et de l’atmosphère vaporeuse

Il tente de capturer l’essence même des formes et des fruits

« Personne n’a mieux connu que lui la magie du clair-obscur »

 

 

 

 

Plateau de pêches avec noix

Chef d’œuvre de simplicité, de rigueur, d’harmonie

Les pêches surgissent de la pénombre

Chardin se rapproche d’elles pour les peindre

Elles semblent réfléchir la lumière et paraissent éclairer de l’intérieur

Elles donnent une impression de mystère, incitent à la contemplation et apportent à celui qui les regarde repos, silence et bonheur

 

 

 

 

Portrait de Chardin aux besicles

Chardin en1778 « Mes infirmités m’ont empêché de continuer à peindre à l’huile, je me suis rejeté sur le pastel »

Il souffrait des yeux, d’où les besicles

Marcel Proust en 1895 : « Au -dessus de l’énorme lorgnon, descendu jusqu’au bout du nez qu’il pince de ses deux disques de verre tout neufs, tout en haut des yeux éteints, les prunelles usées sont remontées, avec l’air d’avoir beaucoup vu, beaucoup raillé, beaucoup aimé, et de dire avec un ton fanfaron et attendri « Hé bien, oui, je suis vieux ! » Sous la douceur éteinte dont l’âge les a saupoudrées, elles ont de la flamme encore »

 

 

 

 

Portrait de madame Chardin, née Françoise-Marguerite Pouget (1707-1791)

Le 26 novembre 1744, après neuf ans de veuvage, Chardin se remariait. Il épousait Françoise-Marguerite Pouget, de huit ans sa cadette.

Elle mettait Chardin à l’abri du besoin

Elle l’aida dans la rédaction de sa correspondance (Chardin écrivait à peine son nom)

Elle lui servit de modèles pour plusieurs scènes de genre

Les Goncourt « Comme il amène au jour victorieusement, ce visage de la vieille Marguerite Pouget, enveloppée jusqu’au coin des yeux de cette coiffe presque monastique, si couvent répétée dans ses figures ! Rien ne manque à cette prodigieuse étude de vieille femme, ni un trait ni un ton. Le front d’une pâleur d’ivoire, le regard tout refroidit et dont le sourire s’est envolé, le plissage des yeux, la minceur décharnée du nez, la bouche qui se creuse et se ferme à demi, ce teint semblable à un fruit sur lequel l’hiver a passé ; Chardin exprime tous ces signes de la vieillesse ; il en donne la sensation et presque l’approche avec ce crayonnage inimitable »

 

 

 

 

Portrait de Chardin à l’abat-jour

Chardin s’est composé un costume avec le même soin, la même attention qu’il portait à la mise en page des fruits et des objets de ses natures mortes. La visière qui protège les yeux de l’artiste et son ruban rose ocré, le foulard noué autour de la tête et du cou, les bésicles, chaque détail est mûrement réfléchi.

Proust « La négligence du déshabillé de Chardin, la tête déjà coiffée d’un bonnet de nuit, le faisait ressembler à une vieille femme

L’étrangeté cocasse d’un vieux touriste anglais

Chardin nous regarde avec la fanfaronnade d’un vieillard qui ne se prend pas au sérieux, exagérant pour nous montrer qu’il n’en est pas dupe la gaillardise de sa bonne santé

 

 

 

 

Portrait de Chardin au chevalet

L’artiste se regarde et s’observe dans un miroir

Le vieux peintre s’est placé devant son chevalet. Il y a posé un châssis recouvert d’une feuille de papier bleu et tient à la main son crayon de pastel

Chardin cache son visage dans l’ombre

Amaigri, les traits affaissés, il paraît voûté

Son regard a perdu sa vivacité, semble désabusé

Chardin veut attirer notre attention sur la tache rouge du crayon de pastel, son nouvel instrument de travail, pour bien montrer que, jusqu’à son dernier souffle, et comme pour défier la mort, l’essentiel pour lui, c’est son œuvre de créateur